Pour une politique de respect, d’accueil et de reconnaissance des personnes d’origine étrangère.
Le monde actuel est déchiré par une contradiction majeure : la circulation des capitaux et des marchandises ne cesse d’être facilitée, tandis que celle des hommes est soumise à des restrictions toujours plus poussées, du moins pour les fractions les plus pauvres de la population mondiale. Des murs s’érigent un peu partout, piégeant ceux qui se mettent en mouvement dans la condition de parias, regroupés dans des camps ou condamnés à l’errance. L’économie mondialisée et financiarisée est aujourd’hui une immense machine à concentrer les richesses dans les mains d’une fraction infime de la population mondiale.
Ces contradictions dans le système mondial provoquent des tensions économiques, migratoires et géopolitiques. De larges fractions du monde sont aujourd’hui déstabilisées, notamment dans le « voisinage » de l’Europe : Moyen-Orient, Afrique du Nord, Afrique Subsaharienne. Le nombre de personnes déplacées dans le monde dépasse aujourd’hui 65 millions ; l’Europe en accueille une très faible part et la France est l’un des pays européens qui déboute le plus grand nombre de demandeurs d’asile. Les politiques étrangères de la France, de l’Union Européenne et des Etats-Unis ont pourtant de larges responsabilités dans une situation de chaos généralisé.
La « crise » actuelle n’est pas celle des « migrants » qui décident de fuir les guerres, la misère, la dictature ou le délitement des institutions de leur pays. Il y a néanmoins aujourd’hui toutes les manifestations d’une grave crise : crise morale et politique de l’Europe, crise des politiques étrangères française et européenne. La politique dite de « gestion des flux migratoires » est notoirement illusoire et coûteuse ; elle est inefficace. Elle provoque une multitude de souffrances, déchire les familles. Elle tue. Les milliers de morts en Méditerranée ne sont pas le produit de la fatalité mais bien de choix politiques délibérés.
En France, depuis 30 ans, la politique intérieure à l’endroit des personnes d’origine étrangère a pris la forme d’une chasse aux « irréguliers » et aux « sans-papiers ». Elle déstabilise une partie de la population pour laquelle on complique la délivrance ou le renouvellement de titres de séjour, la faisant tomber dans l’irrégularité. Le motif des contrôles d’identité au faciès a constitué dans notre pays un facteur majeur d’aggravation des tensions entre la police et les quartiers populaires. Cette politique a été poursuivie sans relâche par tous les gouvernements français qui se sont succédé depuis les années 1980. Elle se traduit aujourd’hui par le refus d’accueillir les exilés et les réfugiés politiques et le démantèlement systématique de leurs campements de fortune. Elle ne saurait se justifier du danger que constitue l’extrême droite : en traduisant en lois et en actes les revendications de cette dernière, elle valide au contraire son discours et le banalise ; xénophobe par nature, elle amplifie la xénophobie et la légitime.
Le tintamarre médiatique est dominé par les voix d’hostilité ou de peur qui s’expriment à propos des « migrants », « exilés », « réfugiés », « étrangers », « musulmans » et sont encouragées par une partie de la classe politique et par le refus de l’État de faire face à ses responsabilités. Il couvre la voix des innombrables volontaires, membres d’associations, d’organisations caritatives, ou bénévoles isolés qui s’activent pour prendre en charge tant bien que mal les exilés.
Nous, signataires de ce texte affirmons :
Premiers signataires
Laurent Bazin (anthropologue), Mohamed Bridji (leparia.fr), Judith Hayem (anthropologue), Alexandra Galitzine-Loumpet (anthropologue, Non-lieux de l'exil), Riaz Ahmad (étudiant), Anna Alter (journaliste écrivaine), Marie Audoux (café culturel Le grand bouillon), Muzamil Baraka (étudiant), Lisa Benou (juriste, historienne), Henri Braun (avocat), Saskia Cousin (anthropologue), Antoine Desailly (peintre), Olivier Douville (psychanalyste), Alain Delame (universitaire), Maryse Emel (professeur de philosophie), Eric Fassin (sociologue), Anne Gorouben (artiste peintre), Caroline Hache (professeure des écoles), Patrick Homolle (professeur), Clara Lecadet (anthropologue), Léonore Le Caisne (anthropologue), Chowra Makaremi (anthropologue), Alain Morice (anthropologue), Barbara Morovich (anthropologue, AFA), Gérard Noiriel (historien), Giorgio Passerone (italianiste), Catherine Quiminal (anthropologue), Vanina Rochiccioli (présidente du GISTI), Monique Selim (anthropologue), Pierre Tevanian (philosophe, LMSI), Sylvie Tissot (sociologue, LMSI), Laetitia Tura (réalisatrice), Jérôme Valluy (politiste), Eugenia Vilela (philosophe, Non-lieux de l'exil), Christiane Vollaire (philosophe), Laure Wolmark (Psychologue, Comité pour la santé des exilés, Non-lieux de l'exil), Tassadit Yacine (anthropologue), Joel et Odile Caron, Marie Cosmo, Marie-José Guenard, Jean Guillien, Julie Sasia, Julien Delecourt, Yves Macchi, Adult Center, Amis, Auberge des migrants, Actes & cités, Bus de France Elise Care, Exils et migrations Lille 3, Terre d’errance.
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