Pie bavarde, Corneille noire, Corbeau freux, Geai des Chênes, Choucas des tours : en France, cinq espèces de corvidés sont l’objet d’un piégeage abject utilisant des conspécifiques comme appelants, c’est-à-dire des oiseaux sauvages appartenant à l’espèce ciblée par des opérations de destruction, conservés vivants après capture aux fins de piéger leurs frères. Les piégeurs leur prendront la vie ‘’après usage’’ s’ils ne la perdent pas avant d’être mis à mort de main d’homme, victimes d’une pratique dont la cruauté fait honte à notre humanité.
Mais voilà : cette pratique multiplierait le nombre de prises par 5 ou par 10 et, elle est légale ! L’Arrêté du 4 nov. 2003 relatif à l’usage des appeaux et des appelants autorise explicitement l’usage d’appelants vivants pour la Pie, la Corneille et le Corbeau freux (Art.7). L’Arrêté du 29 janv. 2007 fixant les dispositions du piégeage des espèces classées nuisibles étend la pratique aux espèces d’oiseaux recherchées (Art.14). Dans le cas du Geai, c’est à la carte, selon les départements qu’un arrêté préfectoral pourvoira à l’autorisation – ou pas. Le Choucas des Tours, qui bénéficie en théorie du statut d’espèce protégée et ne figure pas sur la liste noire des ESOD (espèces susceptibles d’occasionner des dégâts) est dans les faits piégé comme les autres dans plusieurs départements de l’ouest de la France où des préfets n’hésitent pas à user de leur pouvoir de dérogation avec la régularité d’un métronome pour lever l’interdiction de destruction d’espèces protégées et autoriser son tir et son piégeage. Piégeage réalisé au moyen d’appelants.
Pour Crow Life, aucune nécessité humaine ne saurait justifier de faire souffrir un animal qu’il soit domestique, d’élevage ou sauvage. Pire, en le sachant. Or tolérer la destruction de corvidés par piégeage et l’utilisation d’appelants, c’est tolérer que la souffrance animale soit mise en œuvre par le système et par ses institutions à échelle quasi industrielle puisque des centaines de milliers de corvidés sont piégés sur le territoire national chaque année[1]. Ceci sans contrôle des conditions dans lesquelles ils sont maintenus captifs, ni contrôle de leur mise à mort et sans obligation d’en rendre compte ; pas plus de mention des appelants et de leur nombre dans les bilans de piégeage des ESOD départementaux. Quelles réalités recouvre la pratique ? Crow Life a enquêté pour le savoir.
La loi impose que la mort soit donnée de façon à être immédiate et sans souffrance mais elle laisse parallèlement carte blanche aux piégeurs quant à la méthode de mise à mort. Ce libre-choix est inacceptable : comment les laisser juges de la souffrance d’un animal lorsqu’ils le tuent alors qu’ils se sont montrés capables de lui imposer les souffrances du piégeage avant de le tuer ?
Pour Crow Life encore une fois aucune nécessité ne saurait justifier la torture à laquelle sont soumis les corvidés par piégeage.
Parce que la détention dans ces boîtes de la mort porte atteinte à tous les besoins fondamentaux de l’animal ;
Parce qu’aucun animal sauvage, qu’il appartienne ou non à une espèce classée ESOD (espèces susceptibles d’occasionner des dégâts) ne peut se voir infliger pareille torture sans susciter notre indignation et notre condamnation ;
Nous, les signataires de cette pétition, demandons expressément :
1. L’interdiction de l’exploitation des corvidés en tant qu’appelants vivants aux fins de piéger et de tuer leurs conspécifiques voire d’autres spécimens d’espèces sauvages telles que le renard et, en conséquence, l’abrogation de toutes dispositions légales autorisant leur utilisation à ces fins ; en particulier
- L’article 7 de l’Arrêté du 4 nov. 2003, autorisant l’usage d’appelants préalablement définis comme des animaux vivants dans le but de piéger la Pie, la Corneille et le Corbeau Freux ;
- L’Arrêté du 29 janv. 2007 fixant les dispositions du piégeage des espèces classées nuisibles, en particulier par annulation de son article 14 prévoyant l’utilisation, dans les pièges de catégorie 1, d’appelants vivants des espèces d’oiseaux recherchées [ndla : ESOD, ex-nuisibles] et la possibilité de maintien d’un contact immédiat entre appelant et animaux capturés / à capturer dans les pièges à corvidés ;
- L’abandon de cette modalité de destruction dans le cadre de l’actualisation de l’arrêté ministériel fixant la liste des ESOD ; et, idéalement, la sortie des corvidés de la liste des ESOD (ESOD de catégorie 2 / Arrêté ministériel du 3 juillet 2019) ;
2. L’interdiction des pièges de type Larsen qu’ils soient issus du commerce ou de fabrication artisanale, suivant en cela l’exemple d’autres pays européens ;
3. Le lancement d’une étude scientifique collective pluridisciplinaire et indépendante portant sur le piégeage des corvidés et sur ses effets envisagés sous l’angle de la souffrance animale, tant physique que mentale ;
4. Sans attendre les délais nécessaires à la recherche mentionnée point 3, et indépendamment de ses conclusions, l’abandon du piégeage des corvidés ou à défaut de son abandon immédiat, l’adoption d’une obligation légale d’insensibilisation préalable à leur mise à mort en vue de réduire une souffrance animale gratuite, cruelle et inacceptable
5. Sans délai et indépendamment du point 3, l’extension et l’application des sanctions prévues par le code pénal (art. 521-1) en cas de sévices et/ou d’actes de cruauté commis envers « un animal domestique ou sauvage détenu en captivité » à tout corvidé tenu captif dans un piège
6. La fourniture d’un bilan national annuel ou triennal du piégeage par espèce et par département, accessible et consultable par le public
[1] - Les estimations d’un travail de thèse faisaient déjà état de près de 324 000 pies piégées /an en France au début des années 2000. Soit 7 à 8% des effectifs, plus que les chiffres communiqués, et plus que par tir : Chiron F. (2007). Dynamiques spatiale et démographique de la pie bavarde (Pica pica) en France : implications pour la gestion. Thèse de doctorat en écologie, MNHN, 23 fev.2007
[2] https://www.leprogres.fr/societe/2022/05/15/un-hibou-grand-duc-retrouve-piege-dans-une-cage-a-renard
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