L'arrêt de la discrimination dans le concours de l'Éloquence de la Différence

VJ, un-e jeune autiste de 23 ans présentant des troubles du comportement, a été injustement évincé-e du concours l'Éloquence de la Différence, à Lille. Ce concours propose à des personnes bègues de se produire sur scène en présentant un discours oral à un auditoire. La finale a lieu au Théâtre Sébastopol de Lille.

Après avoir postulé et avoir été sélectionné-e, iel s'était présenté-e ce samedi 28 septembre pour le premier rassemblement du concours, proposant aux participant-es retenu-es de rencontrer les autres candidat-es, les bénévoles de l'association ainsi que les étudiant-es en orthophonie. Tout au long de cette première journée d'avant-concours, des masterclass ont été présentées et des activités d'expression orale ont été organisées.

Malheureusement, les troubles autistiques de VJ lae rendent sensible aux hautes fréquences sonores. Iel est régulièrement obligé-e de porter un casque anti-bruit, comme ce fut le cas ce jour-là. En se présentant le matin du samedi 28 septembre, VJ, perturbé-e par le bruit de la salle et par des problèmes d'anxiété, s'est retrouvé-e dans l'incapacité de s'exprimer autrement que via la fonction bloc-notes de son smartphone. À noter qu'iel se retrouve très rarement dans une situation où iel ne parvient pas à communiquer oralement. Néanmoins, ce jour-là, iel n'a donc pas pu participer aux activités orales.

Pris-e à part par une psychologue, VJ s'est confié-e, via l'application bloc-notes de son téléphone, sur ses problèmes de self-harm. Lae jeune non-binaire n'a en aucun cas représenté un risque majeur pour les personnes présentes. Iel n'a pas eu de crise de décompensation nécessitant une intervention extérieure. Après avoir retrouvé ses capacités de parole, iel a exprimé son envie de quitter le séminaire aux alentours de 15h. Plus tard, iel a précisé à un-e bénévole, par message, qu'iel comptait poursuivre l'expérience, et se rendre aux ateliers du mercredi ainsi qu'aux autres rassemblements, ayant lieu les samedis.

Néanmoins, ce lundi 30 septembre, à 20h38, VJ a reçu un appel en inconnu de la part de l'une des orthophonistes bénévoles de l'association, lui indiquant qu'iel ne souhaitait pas lae voir continuer l'expérience, en expliquant que cela n'allait « pas être gérable » et que cela n'allait pas non plus « coller à la dynamique de groupe. » Après avoir indiqué qu'iel comptait se rendre aux activités, VJ a reçu un mail de l'association :

« Nous vous informons par la présente que, suite à une évaluation approfondie de la situation, il a été décidé de vous interdire l'accès à notre programme et à toute autre activité organisée par l'association Éloquence de la Différence, avec effet immédiat. Cette décision a été prise dans le souci de garantir la sécurité et le bien-être de tous les participants et intervenants, ainsi que la bonne tenue de nos événements. Nous vous demandons donc de bien vouloir respecter cette interdiction et de ne plus vous présenter à nos formations. En cas de non-respect de cette décision, nous serions contraints de prendre les mesures légales nécessaires pour assurer la sécurité de nos activités. Nous vous remercions de votre compréhension. Cordialement. L'équipe organisation Éloquence du Bégaiement Lille. »

Au cours de la première journée de rencontre, VJ n'a, à aucun moment, représenté un danger direct ou indirect pour les intervenant-es, ni pour les participant-es, ni pour les étudiant-es en orthophonie présent-es. Iel a été évincé-e du concours d'éloquence à cause de ses troubles du comportement : la misophonie (aversion intense et irrationnelle envers des sons ou bruits spécifiques) liée à l'autisme, ainsi que le recours occasionnel au self-harm. VJ est donc privé-e d'une activité associative relevant de la liberté d'expression, sur des critères directement liés à ses handicaps mentaux.

Or, les discriminations « à l'égard d'une personne physique ou morale » sont punies de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende lorsqu'elles consistent en une exclusion fondée sur un critère protégé (article 225-2 du Code Pénal). Ce concours d'éloquence était particulièrement important aux yeux de VJ, pour lui apprendre à mieux s'exprimer en public malgré son bégaiement, et à lui redonner confiance en ellui. Ayant été sélectionné-e, lae jeune autiste devrait donc avoir sa chance, au même titre que les autres participant-es, de participer aux différentes étapes ainsi qu'à la finale au Théâtre Sébastopol le 4 novembre prochain, où seront convié-es tous-tes les participant-es, même éliminé-es.