Lettre ouverte à Emmanuel Macron et à la communauté des financeurs internationaux
Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs,
A l’heure où je vous écris, des milliers, des dizaines de milliers d’enfants, de femmes et d’hommes meurent en Syrie, dans une parfaite indifférence.
Les effets de 13 ans de guerre, auxquels sont venues s’ajouter les conséquences dévastatrices du séisme du 6 février 2023, ont laissé le pays dans un état de désolation complète.
Médecin pédiatre de formation, j’ai consacré ma carrière à l’humanitaire. Désormais engagé au sein de l’ONG Mehad, présente en Syrie depuis le démarrage de la guerre en 2011, je constate chaque jour, ainsi que l’ensemble de mes collègues sur le terrain, l’ampleur de la catastrophe qui se joue sous nos yeux.
La situation humanitaire est la pire depuis le démarrage de la guerre. Et cela est de VOTRE responsabilité.
16,7 millions de Syriens dépendent de l’aide humanitaire pour survivre. Parmi eux, les deux tiers sont des enfants. Pourtant, seuls 6 % des besoins humanitaires ont été couverts pour 2024. Malgré le terrible séisme de l’an dernier, seuls 40 % des besoins avaient déjà été couverts l’an dernier.
Les Syriens ne peuvent plus se soigner
D’ici la fin de ce mois de juin, 160 établissements de santé, dont 46 hôpitaux, seront contraints de cesser leur activité faute de financements.
Des femmes meurent dans d’atroces souffrances en donnant naissance à leur enfant, faute d’avoir pu être prises en charge correctement.
Les soins d’urgence vitale ne sont plus délivrés. Des malades chroniques - diabétiques, asthmatiques, insuffisants rénaux – n’ont plus de traitement.
Notre ONG n’est pas épargnée par cette crise : plusieurs de nos centres ont dû cesser leur activité, comme l’hôpital mères-enfants de Kafr Takharim. D’autres sont gravement menacés.
Les Syriens ne peuvent plus se nourrir
Le nombre de déplacés internes a augmenté de 90 % en 5 ans. Deux millions de personnes, majoritairement des femmes et des enfants, s’entassent dans des camps de réfugiés dans des conditions sordides et dangereuses.
Dans ces camps, l’accès à la nourriture est extrêmement compliqué. Du fait des sanctions internationales, les prix ont flambé en Syrie, et il est devenu presque impossible de se nourrir correctement.
Actuellement, seules 625 000 personnes sur 3,6 millions souffrant d'insécurité alimentaire sévère sont prises en charge pour sortir de la famine.
Chez les femmes enceintes et allaitantes et les jeunes enfants, les effets de la malnutrition sont directs et terribles : cécités, retards de développement, handicaps physiques... sans parler bien sûr de la surmortalité infantile.
Les Syriens meurent de votre oubli
18 mois après le séisme, 13 ans après le début de la guerre, j’en appelle au Président de la République française, et à la communauté internationale : en 2024, ne détournez pas les yeux de la Syrie.
Apportez la réponse humanitaire appropriée aux besoins, et engagez-vous pour la mise en place d’une solution politique négociée, dans le respect de la résolution 2254 du Conseil de sécurité des Nations unies, seule option pour un avenir durable et sécuritaire pour les Syriens.
Des millions de civils innocents, des hommes, des femmes, des enfants, subissent le pire que l’être humain peut connaître depuis 13 ans. Les oublier constitue la pire des sentences.
Dr Mego Terzian
Directeur général de Mehad
Créée en 2011 par des médecins issus de la diaspora syrienne en réponse à la crise en Syrie, Mehad gère une quarantaine de structures de soins dans le pays et intervient désormais également sur d'autres zones de conflit : Ukraine, Palestine et prochainement au Yemen, avec près de 900 professionnels de santé engagés sur le terrain. Pour poursuivre notre action, votre soutien est fondamental.
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