Pour un grenelle de la santé

Madame la Ministre,

Nous sommes inquiets !

"La santé n'est pas un service comme un autre, c'est un droit fondamental qui ne peut pas être confié au marché" a écrit dans son projet présidentiel, Monsieur HOLLANDE. Six mois plus tard, ce principe fondamental et fondateur de la protection sociale en France est mis à mal par cette même équipe politique. Aussi, nous, internes et chefs de clinique avons décidé de manifester pour exprimer notre refus de voir les mutuelles, instituts de prévoyance et assurances santé jouer un rôle toujours plus grand dans le financement et les orientations du système de santé français.

Cette revendication essentielle n'est pas relayée par les médias, et c'est la raison pour laquelle nous vous écrivons aujourd'hui.

Le débat actuel est focalisé (instrumentalisé?) sur l'ampleur des compléments d'honoraires et leurs conséquences sur le financement actuel de la santé. Nous ne nions pas l'importance de ce problème et de la charge que cela représente pour le patient. Nous rappelons simplement à titre de comparaison que les complémentaires santé engrangent chaque année 10 milliards d'euros de bénéfices avec trente pour-cent de frais de gestion, alors que les compléments d'honoraires représentent 2,5 milliards d'euros.

Nos préoccupations actuelles concernent:
- le PLFSS (projet de loi de financement de la sécurité sociale)
---dans lequel l'Etat se désengage des remboursements de santé en laissant une place plus grande aux organismes de santé privés
- la proposition de loi n°296 déposée par Mr LEROUX
---dans laquelle seront généralisés les "réseaux de soins mutualistes" qui, sous prétexte de diminuer l'avance de frais, vont conditionner le taux et la rapidité des remboursements des mutuelles au fait que le patient accepte d'aller consulter les médecins affiliés à leur mutuelle.

- le report d'un an de l'obligation de publication des comptes des organismes privés de complémentaire santé (pourquoi un tel manque de transparence ?)

Nous revendiquons la tenue d'un "grenelle de la santé" afin d'ouvrir un débat constructif et global sur la problématique du financement du système de santé. Il est indispensable que les patients se rendent compte de la puissance des lobbies des complémentaires santé sur le gouvernement et les médias. Il est indispensable qu'on réforme en profondeur un système de santé créé en 1945 et qui n'est plus adapté aux réalités économiques et sociales actuelles.

Nous souhaitons un système de santé qui respecte les médecins, leurs conditions de travail et de formation, un système qui rembourse justement les patients tout en leur laissant la liberté de choix de leur praticien, un système moderne et viable économiquement.

Nous vous prions d'agréer, Madame la Ministre l'expression de notre haute considération.