Par voie de communiqué de presse, Tereos a annoncé la fermeture de sa sucrerie à Escaudoeuvres (59-Nord) et la distillerie de Morains (51-Marne).
Coup dur pour les salariés de l’entreprise, coup dur pour les élus locaux, et aussi coup dur pour les coopérateurs. En effet, depuis 2002, les agriculteurs ont racheté le groupe Beghin-Say, en investissant chacun le chiffre d'affaires d’une année de betteraves sur leur exploitation. Grâce à cela, l’une des usines les plus rentables du groupe a continué son activité.
À l’aube de son 150ème anniversaire, la sucrerie se voit doter d’une nouvelle chaudière, faisant suite à une série d’investissements : nouvelle tour à chaux, nouvelle toiture conique pour le silo de sucre, rajeunissement du revêtement anti-corrosion de la deuxième tour, rénovation des bassins de décantation. Or, selon Tereos, les 62 Millions d’euros investis ces 5 dernières années ne permettent pas un niveau satisfaisant d’utilisation de l’énergie dans le cycle de fabrication de sucre. En effet, pendant 148 ans, l'usine tournait au charbon, une énergie peu chère ; d'où des sous-investissements dans les recyclages des vapeurs.
Celui qui va trop vite en besogne n'est pas celui qui réussit le mieux
Après 3 années de crise, 2022 a marqué le retour d'une betterave rémunératrice pour les producteurs. Or pendant 3 ans de crise, les producteurs ont continué à produire, à honorer leurs engagements et à permettre de faire tourner l'outil industriel de leur coopérative. L'immense majorité des producteurs a décidé de renouveler son contrat, avec les mêmes engagements de volume. Malgré le manque de courage de l'Etat français pour soutenir la production betteravière, suite à l'arrêt brutal des dérogations d'utilisation des néonicotinoïdes, et toujours sans alternatives économiquement viables, les agriculteurs ont foi en la filière et connaissent la capacité de recherche des semenciers ; et chacun sait qu'il faudra laisser du temps. Et s'il est indispensable que les futures variétés de betteraves soient tolérantes à la jaunisse, résistantes à la cercosporiose, la rhizomanie ou aux nématodes, elles doivent aussi promettre une augmentation de la productivité d'au moins 20% d'ici 10ans.
Par ailleurs, la flambée des prix des matières premières en 2022 semble s'inverser en 2023. Les céréales et les oléoprotéagineux baissent, mais le prix du sucre se maintient à des niveaux élevés, dans un contexte mondial déficitaire. Or les agriculteurs qui ont réduit ou arrêté leur production de betteraves l'ont fait dans un contexte instable. La conjoncture et la solidité de la filière sucrière ramèneront les agriculteurs qui étaient dans le doute, à un niveau normal de production de betteraves.
La crise actuelle de volume de betteraves est donc temporaire. Pour autant, la volonté politique et/ou la résilience de Tereos ne semble pas être en mesure, aujourd'hui, de surmonter cette crise.
"Ça va aller les gars"
Voilà un discours qui n'a pas changé chez Tereos. Il paraît que fermer Escaudoeuvres ne rallongera pas les campagnes. Il paraît que fermer Escaudoeuvres ne changera rien aux services rendus aux producteurs. Il paraît que les pulpes des usines voisines seront de bonne qualité. Il paraît que les écumes sont incomparables. Il paraît que les autres usines ne tombent pas en panne. Il paraît que rallonger les circuits de ramassage de betteraves libère des camions.
Sauf que, dans ce contexte, producteurs de betteraves, les entrepreneurs et consommateurs de co-produits et sous-produits, ont perdu confiance.
Décarbonée, rentable et compétitive
C'est là qu'émerge l'idée d'une nouvelle usine. 500 M€, c'est le budget minimum.
On peut commencer par faire table rase de l'usine actuelle, sauf les silos et l'unité de conditionnement. La tour à chaux et la nouvelle chaudière pourront être affectées sur d'autres usines pour ne pas s'user à l'arrêt, le temps de la reconstruction. Une nouvelle usine permettra :
Amortie en 20 ans (pour potentiellement durer 150 ans!), une usine flambant neuve ne pèsera qu'à hauteur d'1,5€/t de betteraves !
Un tel investissement permettra :
10ans, cest le temps qu'il faut pour construire cette usine. Bien qu’ambitieux, ce délai doit permettre à l'Etat de passer des paroles aux actes. Les procédures de démolition et de reconstruction doivent être simplifiées et accompagnées financièrement. Les collectivités pourront s'engager, à travers cette pétition, à accompagner financièrement la reconstruction de l'usine, les aménagements permettant d'améliorer le confort des riverains; mais aussi soutenir la production de betteraves dans sa transition agro-environnementale.
En conclusion, TEREOS doit envoyer un signal fort : celui de la confiance. Le climat actuel est proche du ”À qui le tour ?". Fermer une usine est un désastre social. En fermer deux est un cataclysme. Si la décision de fermer Escaudoeuvres et Morains est appuyée par des chiffres, elle ne tient pas compte des perspectives de la filière sur le long terme. Elle ne tient pas compte des difficultés des territoires où l’Agriculture y est ancrée. Elle ne tient pas compte du bouleversement pour les familles de ceux qui vivaient pour l'usine. Par contre, en y investissant massivement, le groupe Tereos montrera qu'il est une coopérative avec des valeurs humaines, au service des agriculteurs et des territoires.
Benoit VAILLANT,
Agriculteur et coopérateur Tereos
Président Jeunes Agriculteurs HDF et adhérent CGB
NB 1: la rédaction de cette pétition n'est pas figée. Les chiffres sont des estimations et peuvent évoluer. L'argumentaire peut aussi évoluer en fonction de l'actualité.
NB 2 : l'utilisation des "il n'y a qu'à" et "il faut que" a été proscrite de la rédaction de cette pétition.
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