Covid long : à quand un vrai suivi des personnes touchées ?
Madame la ministre de la santé,
En France, la plupart des acteurs de la santé croient encore, plus de deux ans après le début de la pandémie, que le covid long est psychosomatique.
Pourtant, au Royaume-Uni, de nombreuses études ont démontré une atteinte du nerf vague pour 66% des patients post-covid, ont mis en évidence des micro caillots, et une inflammation du système nerveux selon les cas. Ils ont également ouvert 80 centres post-covid.
En Belgique, des chercheurs ont mené en 2020 une expérimentation de stimulation du nerf vague à l'issue de laquelle l’ensemble des personnes traitées ont vu leur état s’améliorer. De plus, l’offre de soins pour prendre en charge le covid long y est bien plus large qu’en France.
En Allemagne, une étude publiée en mars 2022 par le Hamburg City Health study Covid Programm, recommande un suivi multi-organes de 6 à 9 mois, pour les personnes ayant subi une infection légère à modérée. Extrait traduit de la conclusion de l’étude : “Les sujets qui se sont apparemment rétablis d’une infection légère à modérée par le SRAS-CoV-2 présentent des signes d’affection subclinique multi-organique liés à la fonction pulmonaire, cardiaque, thrombotique.”
Quand allez-vous enfin prendre ce problème d’ampleur national au sérieux ?
La H.A.S. précise, dans son document de prise en charge destiné aux médecins, que ce sont les cas graves, et pour l’immense majorité, hospitalisés, qui développent un covid long. Pourtant, nous sommes de plus en plus nombreux à souffrir de cette condition qui fait de nos vies un enfer. Parmi nous, il y a énormément de personnes ayant été asymptomatiques au moment de l’infection (environ 32% des asymptomatiques souffrent de covid long), des personnes ayant eu une infection légère et des personnes qui l’ont développé après une ou plusieurs doses de vaccin (le gouvernement allemand a reconnu le covid long post-vaccin). Des personnes de tout âge et sans problèmes de santé particulier : enfants, adultes, seniors.
Les médecins, pour la grande majorité et visiblement déroutés par nos symptômes, nous cataloguent rapidement comme anxieux ou dépressifs. C’est pour nous la double peine car en plus de ces symptômes invalidants au quotidien, nous nous retrouvons dans une errance thérapeutique pouvant durer des mois, plus de deux ans pour certains.
Les médecins sont visiblement extrêmement mal informés sur le covid long et ont des préjugés ahurissants, la plupart ne savent pas que les symptômes sont intermittents, les patients alternant entre des périodes de récupération et de rechute. A t-on déjà vu quelqu'un souffrir de dépression une semaine et être en parfaite santé la suivante ? Tout ça devient absurde.
Pourquoi un tel décalage entre les scientifiques et les médecins ? Est-ce que les autorités de santé française s’intéressent seulement aux études menées à l’étranger, bien plus nombreuses que chez nous ?
Des personnes perdent tout à cause de cette maladie dont la prise en charge est largement inadaptée (dans les centres covid long aussi d’après les nombreux retours que nous recevons). Nombre d’entre nous ont suspendu leur activité professionnelle et complètement modifié et adapté leurs modes de vie pour survivre aux symptômes. Nous multiplions les rendez-vous médicaux en espérant être enfin entendus et reconnus, en vain.
Les médecins ne font que prescrire de la kiné respiratoire, donner des antidépresseurs à tour de bras, et envoyer les patients chez les psys, qui les renvoient chez leur médecin après avoir éliminé une éventuelle cause psychique. Des patients se voient taxés d’hypocondriaques ou de simulateurs, ce qui est insupportable. Les médecins ont une responsabilité quand ils prennent en charge notre santé et nous n’acceptons plus leur diagnostic facile et erroné.
C’est inacceptable. Comment peut-on nous laisser seul.e.s et sans suivi ?
C’est pourquoi nous exigeons un suivi régulier (cardio, neuro, orl, gastro…) pendant 6 à 9 mois, adapté à l’ensemble des symptômes du patient, la première année étant incertaine et ce même en cas d’examens normaux. En effet, il a été prouvé que le covid long est une affection multi-organes et que des atteintes tissulaires existent, même si elles ne sont pas toujours détectées.
Nous refusons de continuer à vivre dans cette insécurité permanente. Nous recevons des témoignages de personnes obligées d’aller en Allemagne ou en Belgique pour être suivis convenablement. C’est une honte.
Nous ne demandons pas de miracle, nous avons conscience que le covid long n’est pas encore bien compris par la science, ce que nous demandons c’est un suivi régulier et multidisciplinaire de l’évolution de notre état de santé, et une collaboration des médecins avec leurs patients pour mieux appréhender les symptômes.
L’arrivée de ce nouveau virus et toutes les complications qu’il entraîne nécessite que la médecine remette en question ses diagnostics habituels et prenne conscience que tous les risques sont à prendre en compte, quelque soit l’âge de la personne, son sexe, son poids, son endurance, ses conditions de santé pré infection au virus SAR COV2 ou post-vaccin.
700 000 covid long sont reconnus en France aujourd’hui, mais combien en réalité ? La majorité des médecins n’oriente pas correctement leurs patients. Combien de gens pris pour des fous ? Non, nous n’avons pas somatisé parce que nous avions soi-disant peur d’être infecté par le covid ou parce que l’infection nous aurait laissé traumatisés. Comment peut-on avancer une telle chose ? Nous sommes les seuls à savoir ce que nous vivons et personne ne peut le savoir à notre place. Aujourd’hui, nous n’avons plus confiance en nos médecins.
Comment pouvons-nous espérer comprendre un jour cette pathologie complexe qu’est le covid long si les médecins ne suivent pas l’évolution de nos symptômes ? Et combien de dégâts encore avant que vous ne fassiez quelque chose ?
Le collectif « Les oubliés du covid long »
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