Aujourd'hui, les diplômés remplaçants sont "virés" de leur affectation du jour au lendemain pour être remplacés par des contractuels.
Je suis Mathilde PICAT, enseignante diplômée certifiée depuis 10 ans, TZR (Titulaire en Zone de Remplacement) depuis 6 ans. J'étais en poste fixe dans un établissement en Haute Savoie, tous les points que j'avais acquis m'ont permis de revenir dans la région grenobloise d'où je suis originaire, mais je n'ai pas réussi à obtenir de poste fixe, c'est pourquoi je me suis retrouvée par la force des choses TZR. Je remplace des collègues en arrêt maladie à plus ou moins courtes durées, ce qui nous amène parfois à faire plusieurs établissements dans l'année entre une période de un mois à un an si les arrêts sont renouvelés, ce qui m'est arrivé 4 ans sur 6. Chaque année, je demande des mutations que je n'obtiens pas et subis encore et encore ce statut.
Le 30 août 2024, on m'envoie un arrêté qui me nomme sur 2 lycées jusqu'au 18 octobre mais les chefs d'établissement m'annoncent que la collègue ne reviendra pas et que ce remplacement sera reconduit toute l'année, ce qui arrive souvent. Ravie, je m'installe et commence une progression annuelle, un programme de mes séquences sur l'année scolaire. Mais le lundi 1er octobre, les proviseurs m'annoncent après ma journée de cours, surpris et ne comprenant pas ce qu'il se passe, qu'une contractuelle a été nommée sur mon poste dès le lendemain.
Un contractuel est une personne non diplômée (ayant minimum bac +3 pour l'enseignement général et bac +2 pour l'enseignement professionnel) qui est embauchée par contrats (CDD qui peut être CDI-sé à partir de 6 ans d'ancienneté) par le rectorat. Ils représentent aujourd'hui 20% de l'équipe enseignante.
Le rectorat étant injoignable et en l'absence de document officiel (ils avaient seulement reçu l'appel de la contractuelle qui elle avait été contactée par le rectorat), je suis restée un jour de plus au lycée mais je vivais dorénavant "au jour le jour" comme le proviseur d'un lycée me précise. J'ai écrit au rectorat et voici la seule réponse reçue de la gestionnaire des remplacements par les personnels non titulaires :
"Les TZR n'étaient placés que jusqu'au 18/10 sur des remplacements dans l'attente de trouver une solution pérenne".
La solution ayant été trouvée avec Mme X.
Les établissements ont été informés par la Secrétaire Générale sur le fonctionnement de ce début d'année. Et Mme X a appelé les établissements afin de leur dire qu'elle était disponible pour le poste.
De ce fait les TZR pourront pallier d'autres remplacements dans leur zone où nous n'avons pas de moyens de remplacer.
Dès lors que Mme X m'aura précisé sa date de prise de fonction vous serez envoyée sur un autre remplacement où les élèves n'ont pas de professeurs comme le permet votre statut."
J'ai reçu ce matin-là, mardi 1er octobre, un nouvel arrêté qui avait pour date de fin le jour même, pour laisser la place à la contractuelle dès le lendemain. J'étais évidemment sous le choc. Les proviseurs ne comprenaient pas non plus pourquoi changer une situation mise en place depuis des semaines qui fonctionnait pour tout le monde en qualifiant ces décisions d'inhumaines et de maltraitantes.
Jeudi 3 octobre, je suis dans un des lycées pour rendre les clés quand je reçois un nouvel arrêté qui "annule et remplace" le précédent pour me laisser à nouveau le poste jusqu'au 18, comme initialement prévu. Personne n'avait été informée de ce nouveau changement sauf la contractuelle qui avait été appelée le 1er octobre, le jour où on me "virait". Je suis consciente que malgré ces 2 semaines que le rectorat "m'octroie", à la rentrée de novembre, je serai remplacée par un contractuel, comme le préconise leur nouvelle politique.
La loi du "un prof devant chaque classe" peu importe qui ni comment s'applique au détriment du professeur remplaçant diplômé affecté en début d'année sur le poste sur un siège éjectable dans l'attente d'être remplacé par un contractuel. Des établissements en manque de professeurs, il y en a de partout depuis septembre mais au lieu de mettre les contractuels en attente sur ces postes vacants, le rectorat préfère enlever les TZR déjà en poste depuis la rentrée pour les utiliser à boucher les trous dans les établissements où les contractuels ne veulent pas aller et pour des plus courtes durées. La politique du rectorat est de garder les postes les plus avantageux pour les contractuels par différents moyens:
- en "virant" les TZR déjà en poste pour les remplacer par des contractuels
- en accordant la priorité aux contractuels sur les remplacements longues durées
- en "réservant" exclusivement certains postes dans des établissements privilégiés aux contractuels (ces postes ne passent jamais aux mouvements des mutations et ne sont jamais disponibles ni accessibles pour les professeurs diplômés désireux d'obtenir un poste fixe).
De plus, les contractuels ont des avantages que les TZR n'ont pas :
- vœux d'affectation au mois d'avril / de mai
- proposition d'un emploi courant juillet (voir fin août)
- droit d'accepter ou de refuser l'affectation
A contrario, les TZR :
- connaissent leur affectation du jour au lendemain début septembre et au cours de l'année
- ont l'obligation de prendre le(s) poste(s) où ils sont affectés
- sont affectés sur les postes que les contractuels ont refusé ou déserté
- sont "virés" du jour au lendemain pour laisser leur place aux contractuels
Depuis 2020, à la faveur du "contrat de projet", les employeurs publics peuvent privilégier l'embauche d'un contractuel sur celle d'un titulaire ce que la loi n'avait jusqu'alors jamais permis.
Cette nouvelle politique nous met, les contractuels et les TZR, en compétition alors que nous sommes collègues. Une course aux postes où les TZR sont automatiquement perdants puisque les contractuels ont dorénavant la priorité et le choix des postes.
Complétement à bout, démotivée et épuisée par ces changements incompréhensibles, brutaux et soudains, j'ai la nette sensation d'être un pion que le rectorat déplace à sa guise sans prise en compte de l'humain, des élèves qui ne cessent de s'adapter, et de la logique et progression pédagogiques qui leur importent peu.
En 1 mois, j'en suis à 3 arrêtés différents qui "annulent et remplacent" les précédents pour être effectif le jour même. Dorénavant, comment puis-je faire confiance aux arrêtés que je reçois puisque comme me dit le rectorat "un arrêté peut être modifié lors d'une suppléance en cours"? Comment être un professeur serein quand il ne sait pas de quoi demain sera fait ? Comment avoir une progression logique, pertinente et efficace face à des classes si on n'est pas sûrs de les revoir ou sachant pertinemment qu'il nous reste plus que 2, 3 ou 4 heures de cours?
Le rectorat reste sourd et muet face à nos appels, mails et demandes. Les TZR sont toujours remplacés par des contractuels car telle est leur politique. Nous subirons encore ces injustices tout au long de l'année, ainsi que pour toutes les rentrées scolaires prochaines.
Nos demandes sont simples, que les TZR soient :
- prioritaires sur les remplacements dès le début d'année
- prioritaires sur les remplacements longue durée
- toujours en poste lors de renouvellements des arrêtés (des arrêts maladies reconduits)
- affectés en fonction des distances entre les établissements d'affectations et leur domicile
Vous avez rajouté de l'eau à votre bouquet ? Parfait, vous pouvez être qualifié de paysagiste !
Vous avez déjà donné un doliprane à votre enfant? Parfait, vous pouvez être qualifié de médecin !
Vous connaissez votre table de 9 ? Parfait, vous pouvez être qualifié de comptable !
Vous savez ce que veut dire "I love you"? Parfait, vous pouvez prendre ma place !
Vous trouvez cela ridicule ? Moi aussi.
A quoi sert un diplôme s'il n'a aucune valeur ?
Je suis suivie par de nombreux collègues, parents d'élèves, élèves, syndicats et les communautés des réseaux sociaux (stylos rouges, TZR en colère, TZR de Grenoble).
Je souhaite à présent être entendue et soutenue par la presse afin de mettre au grand jour ce que personne ne sait ainsi que la population française.
En signant cette pétition, vous pointez du doigt les injustices de l'éducation nationale au rectorat et au gouvernement français et vous participez à un monde plus juste pour l'école, vos enfants et le personnel enseignant.
Mme PICAT Mathilde
Enseignante par vocation, TZR par dépit, en colère par injustice.
Vous êtes sûr ? Votre mobilisation est importante pour que les pétitions atteignent la victoire !
Sachez que vous pouvez vous désinscrire dès que vous le souhaitez.