Cette lettre a déjà été remise au Président de la République le 14 mai dernier, avec plus de 25 000 signatures. Malgré l’écoute de la présidence de la République, aucune réponse ne nous est apportée.
Nous vous invitons à continuer de signer cette Lettre ouverte qui sera remise au président de la République à l’occasion de la Conférence nationale du handicap prévue à l’automne prochain.
Monsieur le Président,
En 2017, alors candidat à la présidence de la République, vous consacriez une carte blanche au handicap. Quelques mois plus tard, élu, vous en faisiez une des priorités de votre quinquennat.
Deux ans après, malgré quelques mesures positives, les droits des personnes en situation de handicap et de leurs proches sont toujours bafoués, inappliqués voire en régression. Une contradiction avec les engagements de la France pourtant signataire de la Convention des Nations unies relative aux droits des personnes handicapées.
> 2 millions de personnes en situation de handicap sous le seuil de pauvreté
Même si l’allocation aux adultes handicapés (AAH) atteindra 900 euros en novembre 2019, son montant restera toujours sous le seuil de pauvreté. De plus, cette mesure ne concerne pas tous les bénéficiaires notamment ceux vivant en couple. Sans compter la suppression du complément de ressources (179 € par mois : garantie de ressources attribuée aux personnes les plus éloignées de l’emploi) pour les nouveaux bénéficiaires de cette allocation depuis le 1er janvier.
D’ailleurs, 82 % des personnes en situation de handicap et leurs proches déclarent s’en sortir difficilement avec les ressources de leur foyer. Près de 70 % déclarent que la revalorisation de l’AAH n’a rien changé pour elles et 16 % disent avoir perdu certains droits.*
En outre, la prise en compte des ressources du conjoint dans la base de calcul de l’AAH reste une injustice créant une dépendance inacceptable : quelle personne accepterait que l’on calcule son salaire en fonction de celui de son conjoint ?
Quant aux titulaires de pensions d’invalidité, ils sont pénalisés par une revalorisation très inférieure à l’inflation. Une injustice alors que certains d’entre eux bénéficient de pensions très faibles, très en dessous du seuil de pauvreté également.
> Les aides à l’autonomie insuffisantes et trop peu ou pas prises en charge
La prestation de compensation du handicap (PCH) censée financer les aides à l’autonomie (aides humaines, aides techniques, aménagements divers…) demeure largement insuffisante dans son montant et dans son périmètre pour couvrir les dépenses réelles. Conséquence : des reste-à-charge très importants occasionnant trop souvent des renoncements aux droits.
De plus, les plans d’aide proposés par les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) sont très souvent en deçà des besoins et/ou revus le plus souvent à la baisse. En outre, la PCH ne couvre toujours pas, notamment, les activités domestiques et les aides pour l’exercice de la parentalité.
Ainsi, 6 % seulement des personnes en situation de handicap et leurs proches estiment que la PCH convient telle qu’elle est.*
> Un pays toujours inaccessible
La société aurait dû être accessible en 2015 selon la loi "handicap" de 2005. En 2014, pour pallier ce retard, les agendas d’accessibilité programmée (Ad’ap) ont été mis en place…
Mais les dérogations sont si nombreuses qu’elles remettent littéralement en cause les principes fondamentaux de l’accessibilité. Et, à ce jour, aucun bilan précis de la 1ère phase des Ad’ap n’a été communiqué et les sanctions prévues se font attendre.
Sans parler de la loi Elan sur le logement qui prévoit de passer de 100 % de logements neufs accessibles à seulement 20 %.
Pourtant l’accessibilité concerne toute la société : personnes en situation de handicap mais aussi personnes âgées, parents avec poussette, blessées temporaires, etc.
Et l’accès au logement, aux lieux publics et aux transports est une demande prioritaire des personnes en situation de handicap et de leurs proches, avec des ressources décentes et une compensation intégrale.*
Aujourd’hui, ce sont déception et colère qui prédominent chez les personnes en situation de handicap et leurs proches.
83 % estiment que, durant les deux années écoulées, les engagements pris durant la campagne électorale n’ont pas été tenus.*
89 % sont mécontentes de l’action menée depuis deux ans et n’ont pas confiance pour que les difficultés des personnes en situation de handicap et de leurs proches soient mieux prises en compte dans la société.*
"En route pour nos droits !"
Aussi, du 7 au 14 mai, les personnes en situation de handicap avec leurs proches ont décidé de faire entendre leur voix et de faire valoir leurs droits dans toute la France.
Et une caravane, venant des quatre coins du pays, traversera la France pour rejoindre Paris le 14 mai et remettre cette lettre ouverte au président de la République.
Parce que pouvoir exercer ses droits fondamentaux,
pouvoir bénéficier de ses propres ressources et vivre dignement,
pouvoir être autonome et financer son autonomie,
pouvoir se loger,
pouvoir se déplacer,
c’est la base,
nous vous demandons, Monsieur le président de la République, de faire de votre "priorité au handicap" une réalité en droits pour les personnes.
Pour cela, nous vous demandons de prendre dès la prochaine Conférence nationale du handicap prévue en juin les mesures et les engagements suivants :
> Introduire le handicap dans la Constitution française en l’ajoutant dans son article 1er tel qu’il a été modifié par l’Assemblée nationale en juillet 2018 : « Elle [La France] assure l'égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction de sexe, d'origine, de handicap ou de religion. »
> Supprimer la prise en compte des ressources du conjoint dans la base de calcul du montant de l’AAH et créer le revenu individuel d’existence pour les personnes en situation de handicap qui ne peuvent pas ou plus travailler, distinct du projet de revenu universel d’activité ;
> Elargir le périmètre de la prestation de compensation aux activités domestiques et à l’aide à la parentalité, supprimer les barrières d’âge et créer le "risque autonomie" pour toutes et tous, en mobilisant des financements supplémentaires de solidarité nationale ;
> Faire respecter les obligations d’accessibilité et appliquer dès maintenant les sanctions pour tous les établissements recevant du public ;
> Revenir à 100 % de logements accessibles et maintenir une obligation d’ascenseur à R+3 sans dérogation.
> Rendre effectif le droit aux transports sur tout le territoire : mettre en accessibilité l’ensemble des moyens de transports publics et soutenir le développement d’une offre complémentaire de transports adaptés, sur tout le territoire, avec une amplitude horaire et un tarif équivalents aux transports publics.
Nous vous prions de croire, Monsieur le président de la République, en l’expression de notre haute considération.
APF France handicap et l’ensemble des signataires de cette lettre
*Résultats de la 2è édition du baromètre France handicap de la confiance réalisé avec l’Ifop en mars 2019
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