L’association des maires de France (AMF) hésite à se réjouir. La réforme des rythmes scolaires, emblématique mesure du quinquennat Hollande et très contestée à l’époque, ne sera plus obligatoire à compter de la prochaine rentrée.
Pendant la campagne, Emmanuel Macron s’est engagé à redonner de la «souplesse» aux municipalités notamment dans l’application de cette réforme. Les communes, en «lien étroit» avec les écoles, auront désormais le choix : retourner à la semaine de quatre jours de classe, ou conserver le rythme de quatre jours et demi.
Un décret est déjà prêt, assure l’entourage du Président, et devrait être publié cet été. «Ce texte a toutes les apparences de bonnes intentions, puisqu’il nous redonne la liberté», commence Agnès Le Brun, vice-présidente de l’AMF, qui fédère 98 % des communes du territoire.
Elle reste pourtant sur la réserve :«Je suis circonspecte. Il ne faudrait pas que ce soit une façon pour l’Etat de se désengager financièrement. L’aide donnée est déjà insuffisante.
«Enorme machine». Depuis la mise en place de la réforme, l’Etat débloque une enveloppe annuelle pour aider les communes à financer les activités périscolaires, pour permettre de garder les enfants jusqu’à 16 h 30.
Emmanuel Macron s’est engagé à maintenir ce fonds jusqu’en 2019 puis de le réserver aux communes les plus pauvres. Aujourd’hui, l’aide est de 50 euros par élève et par an (90 euros pour les municipalités les plus en difficulté) sur les 240 euros dépensés en moyenne, selon l’AMF. Le temps en dehors de la classe est en effet une compétence des communes.
Au-delà des difficultés techniques (locaux, animateurs formés en nombre suffisant, etc.), les élus avaient tempêté à l’époque contre ce transfert de charges. Une vingtaine de petites communes rebelles avaient même tenté de mener la résistance au moment de la généralisation de la réforme, à la rentrée 2014.
Finalement, après les premiers mercredis un peu chaotiques, les élus avaient plié. Ils appliquaient depuis la réforme bon an mal an. Au point, assure Vanik Berberian, président de l’association des maires ruraux, que «les rythmes n’étaient plus un sujet. Nous n’en parlions plus.»
Emmanuel Macron remet donc le sujet sur la table. Les conseils municipaux vont devoir à nouveau débattre… Continuer ? Enclencher la marche arrière ? Certaines municipalités ont déjà commencé à réfléchir, à l’image de Lyon. «On s’est posé la question avant l’élection du Président vu que la majorité des candidats proposaient de revenir sur cette réforme», explique la mairie. Tous, en réalité, sauf Benoît Hamon.
A Lyon, il a été décidé «au moins pour l’année prochaine» de continuer le rythme des quatre jours et demi «De toute façon, on ne pouvait pas se permettre de tout chambouler comme ça, aussi vite. La rentrée de septembre ne s’organise pas juste l’été qui précède, rétorque la municipalité. C’est une énorme machine. Pour cette réforme, on mobilise 1 600 animateurs pour les 36 000 écoliers.»
Pour la rentrée 2017, aucun changement à Lyon, donc. Pour la suite, rien n’est tranché, «trop tôt pour dire». Dans les grandes agglomérations, il semble de toute façon impossible que la semaine de quatre jours et demi soit abandonnée dès septembre, tant l’organisation de la rentrée se prépare longtemps à l’avance.
«Attractivité». Pour ce qui est des petites communes, le président de l’association des maires ruraux doute également qu’elles reviennent rapidement à la semaine de quatre jours. «A mon avis, il n’y aura pas beaucoup de retours en arrière, car il n’est jamais simple de changer une organisation. Et puis pour les petites communes, l’école, c’est un élément d’attractivité pour les familles. Elles sont souvent fières des activités périscolaires proposées.»
Ainsi, par exemple, à Janvry, village de 650 habitants dans l’Essonne, le maire, Christian Schoettl (Nouveau centre), faisait partie des élus les plus remontés contre cette réforme qui «épuise les enfants». Il avait d’ailleurs pris soin de n’embaucher que des vacataires pour les activités périscolaires, misant sur la suppression de cette «réforme idiote».
Sans se débiner, il annonce que les 60 élèves de sa commune vont repasser à la semaine de quatre jours dès la rentrée… mais qu’il continuera de proposer les ateliers d’équitation et d’anglais après la classe.
Francette Popineau, représentante du principal syndicat des enseignants de primaire (Snuipp), se désespère que tout aille si vite. Elle lance un appel au nouveau président : «Ne recommencez pas les mêmes erreurs. La réforme des rythmes n’avait associé à la réflexion ni les enseignants ni les parents. Prenons le temps cette fois !»