Monsieur Sézionale, mesdames et messieurs les dirigeants et décideurs de la Fédération Française de Natation,
En préambule, et pour bien situer les tenants et aboutissants d’une telle démarche, l’objectif de cette lettre ouverte est de trouver des solutions pour améliorer le niveau de l’équipe de France et d’imaginer quel sera notre sport dans 10 ans .
Il s’agit d’imaginer quelle sera la vie des nageurs qui décideront de faire de la natation leur activité première, et donc leur métier. Il s’agit aussi d’imaginer la visibilité et le poids que notre sport aura au sein de la concurrence médiatique des autres sports.
Tout d’abord,
Quel est le modèle actuel du développement du haut niveau en natation en France ?
La chose est simple, ce modèle repose presque entièrement sur les clubs.
Dans le PPF (projet de performance fédéral), deux centres nationaux (INSEP et FONT ROMEU) fonctionnent sur des fonds ministériels ou fédéraux. On peut même nuancer ce propos car les athlètes en centres nationaux sont largement financés par leur club d’attache.
Pour le reste, les CAF et les clubs « excellence » se reposent presque entièrement, pour ce qui est des salaires et des relations avec les exploitants de piscine, sur les clubs. La part de subventions ANS (agence nationale du sport) et fédérale dans le budget de ces structures est marginale.
Encore plus bas, nous trouvons tous les autres clubs, qui ne profitent d’aucune aide du monde sportif, et qui pour beaucoup essaient de former dans les meilleures conditions les jeunes nageurs.
Si l’on réfléchit simplement, il existe 3 voies pour développer le haut niveau
1/ Un renforcement des fonds alloués au haut niveau via l’ANS
2/ Un renforcement des fonds alloués au haut niveau via la FFN
3/ Une politique fédérale qui vise à consolider politiquement et financièrement les clubs.
Cela fait 20 ans que les financements ANS (provenant anciennement du ministère des sports) s’appauvrissent peu à peu, en se concentrant toujours plus sur l’élite et en délaissant, faute de moyen, la formation. Cela ne s’arrangera pas demain avec les cadres techniques détachés du ministère des sports amenés à disparaître.
Tout le monde est également conscient que la FFN ne pourra jamais supporter l’effort financier d’un développement du haut niveau à grande échelle.
Il ne nous reste donc que le point numéro 3, c’est-à-dire donner aux clubs la capacité de se développer et d’être porteurs de projets de haut niveau.
Alors où en est le poids des clubs aujourd’hui et quelle est leur capacité à construire et stabiliser dans le temps une structuration amenant le plus haut niveau de performance ?
Et bien beaucoup de ceux qui vivent dans les clubs le ressentent.
Les clubs souffrent, et ces mots sont pesés ! D’abord exsangues financièrement, souvent incapables de payer correctement leurs salariés, politiquement affaiblis et en concurrence permanente avec les autres utilisateurs des bassins, quand ce ne sont pas des refus directs provenant d’une DSP (piscine gérée par une délégation de service public).
Vous cherchez des solutions aux performances de l’équipe de France en vous centrant sur le haut niveau, qui est la face émergé de l’iceberg. Et si la solution était sous nos pieds ?
Votre sol s’effrite, notre sol s’effrite, les clubs souffrent, parfois meurent.
Des bons constats naissent les bonnes solutions !
Mesdames et messieurs les politiques, votre priorité devrait être de donner de la place aux clubs, de construire un espace susceptible de les voir se développer.
La Fédération Française de Natation fait l’inverse depuis de longues années en affaiblissant le poids des interclubs, et donc l’idée que de l’équipe puisse naître des performances individuelles.
Alors oui, l’équipe ne construit pas en soi les performances individuelles. Et oui, si le calendrier par équipe devient trop important, alors les planifications de nos meilleurs nageurs pour les grands championnats pourraient être contrariées.
Mais non, nous ne pouvons pas faire sans, car à ne voir que les défauts d’une confrontation par équipe, vous n’avez pas perçu que c’est en fait notre salut.
Notre salut, nous le rappelons, c’est le développement politique et financier des clubs. Celui-ci ne peut pas passer sans un championnat par équipes.
Tous les sports qui ont su générer une économie qui, par ruissellement, profite aux sportifs et aux staffs (car c’est bien eux en bout de chaîne qu’il faut accompagner) se servent du format par équipe pour se développer.
La raison est simple :
Comment convaincre les collectivités de nous accompagner financièrement sans un calendrier récurrent ?
Comment convaincre les collectivités de nous accompagner financièrement quand la performance finale est portée par un nom de famille et non celui d’une ville ?
Comment convaincre les collectivités de nous accompagner financièrement quand en bout de chaîne de la performance, l’athlète enfin visible représente la France, tandis que le nom du club est à peine cité ?
Comment convaincre les collectivités de nous accompagner financièrement quand notre actualité forte, nos compétitions de références, n’ont lieu que deux fois par an ?
Comment développer financièrement un club quand nous n’avons ni audience ni billetterie ?
Comment convaincre des partenaires privés de nous accompagner quand nous n’avons pas de visibilité ?
Comment faire du lobbying politique intelligent quand nous ne pouvons pas inviter régulièrement les politiques locaux lors de nos manifestations ?
Pour toutes ces raisons et sans doute d’autres , il est important, voire crucial pour notre sport, de construire un championnat par équipes en complément du programme individuel existant.
Il faudra bien sûr en dessiner les contours, mais certaines idées ci-dessous pourraient être débattues.
- Championnats sur 6 mois de septembre à février en bassin de 25m
- Format court (2 à 3 h)
- Équipe de 4 à 6 nageurs (un championnat féminin et un championnat masculin).
- Rencontre tous les 15 jours (10 à 12 «rencontres» par équipe sur 6 mois)
- A moyen terme : des divisions avec montées/descentes tous les ans
Merci d’avance pour toute l’attention que vous apporterez au sujet de ces idées.
Nous sommes ensemble, nous sommes la natation, nous devons changer.